« J’ai déconné, j’ai fait des trucs ‘pas très catholique’. Et j’ai divorcé il y a 5 ans. Depuis, je n’ai cessé de chercher le ‘pourquoi du comment’ : je suis allé voir des psychologues et des coachs du bien-être ». Ce sont les mots de Morgan et à l’évidence, il se croit bien loin d’une médaille, comme celle attribuée après un marathon, une épreuve olympique ou un championnat de France . Et pourtant…
D’une certaine manière, ces mots ressemblent à ceux du prophète Elie qu’on vient d’entendre : « Maintenant Seigneur, c’en est trop […] : je ne vaux pas mieux que mes pères » 1 R 19, 4. Ces propos de Morgan et d’Elie traduisent une sorte d’épuisement, ils sont pleins de honte voire de culpabilité. Et ils sont lourds à porter. Ce qui importe pourtant pour les chrétiens, c’est simplement de se savoir aimés par Dieu précisément à l’endroit où on ne s’aime pas soi-même. 
De fait, que peuvent peser nos défaillances, si grandes soient-elles, devant l’amour sans faille de Dieu ? Le Bienheureux père Lataste, un frère dominicain de Gironde, l’exprimait ainsi au XIXème siècle, je le cite : « Dieu a semblé dire à l'homme : ‘tu pensais avoir desséché par ta malice la source de mes bontés ? Ingrat ! Et bien non, tu n'auras pas le dernier mot : plus tu as été mauvais et plus je serais bon, plus tu es coupable et plus je serais miséricordieux. Et tu apprendras qu'il n'est rien au monde qui puisse se mesurer à ma miséricorde et à ma bonté » . C’est donc ainsi : chacun doit bien sûr devenir responsable  de ses actes, mais d’une certaine manière, face à la bonté disproportionnée de Dieu, le péché des humains est insignifiant !
Suis-je en train de faire une apologie de la médiocrité et du péché ? Je ne crois pas. Je ne cherche absolument pas à banaliser le mal, ni celui qu’on est capable de faire et encore moins celui qu’on peut subir. Simplement, qu’on se détende sur nos propres péchés, sur nos hontes et sur nos culpabilités. Je propose juste qu’on regarde un peu plus loin, c’est tellement plus beau. 
Parce que notre vie, c’est surtout une réponse à l’amour reçu de Dieu. Et en recevant un tel amour, nous ne pouvons sincèrement pas répondre n’importe quoi. En tout cas, je fais le pari qu’en n’en finissant pas de recevoir cet amour de Dieu, nous deviendrons de plus en plus amoureux en réponse.
Recevoir cet amour si inouï de Dieu, c’est donc sans doute en définitive la seule véritable épreuve de notre vie. C’est d’ailleurs souvent là qu’on cale : l’in-conditionnel de l’amour de Dieu nous parait si souvent tellement excessif et scandaleux qu’on cherche à le re-conditionner, feignant alors d’oublier, avec les conséquences que ça suppose pour nos vies de disciples, que le Christ est venu en priorité pour les plus fatigués d’entre nous et pour ce qu’il y a de plus crasseux en nous.
Quoiqu’il en soit, même si je ne sais pas bien comment faire pour recevoir cet Amour concrètement, je crois que c’est le bon combat pour aujourd’hui. De fait, on ne peut pas toujours utiliser son énergie à chercher ce qu’on n’aime pas en soi ou chez les autres… au risque de vraiment trop s’aigrir. Il est plus précieux, quitte à paraitre un peu naïf pour certains, il est plus précieux d’utiliser notre énergie à chercher ce qui est beau et ce qui fait vivre : parce que c’est là qu’est l’Esprit Saint. 

Et pour nous les chrétiens, chercher l’Esprit, c’est notre manière de participer à construire « la plus belle version de l’humanité »3 pour reprendre la magnifique expression de Tony Estanguet lors de la cérémonie d’ouverture des JO. Cette quête du beau et du bon reflète l’ambiance exigeante d’une épreuve, c’est vrai. Mais nous ne sommes pas seuls : si ce sont les médaillés olympiques qui ouvrent la voie des plus jeunes sportifs (bravo à tous les médaillés d’ailleurs ! Et merci à tous les athlètes, médaillés ou non, qui ont fait rêver tant d’entre nous depuis 2 semaines), si ce sont les médaillés olympiques qui ouvrent la voie des plus jeunes sportifs, ce sont les Saints ayant répondu à l’amour de Dieu qui nous ouvre le chemin à tous, comme Sainte Claire (en passant, bonne fête à toute les Claire aujourd’hui), comme Claire et sa recherche de pauvreté, à Assise en Italie, comme François de Sales et sa douceur, en Savoie, comme Thérèse Couderc et sa découverte de la bonté, en Ardèche, comme Léonie Aviat et son humilité, en Champagne… les saints sont si nombreux, au milieu de nous, plus ou moins connus, plus ou moins anonymes, partout ! Et ils nous ouvrent le chemin, à partir de là où on est, avec nos espoirs, nos colères et nos déceptions.
« Maintenant, Seigneur, c’en est trop […] : je ne vaux pas mieux que mes pères » dit Elie. Allez, répond l’ange de Dieu : « lève-toi et mange, car il est long le chemin qui te reste ». 1 R 19, 7 
A chaque page de l’Evangile, Dieu semble toujours ainsi prendre soin de nous et nous dire toujours la même chose : « Que je t’aime !  Et je t’aime quoiqu’il arrive ! Je t’aime là où tu ne t’aimes pas ».
Ce « je t’aime », c’est précisément ce que nous célébrons à chaque Eucharistie : un amour reçu auquel nous répondons par une liturgie.
Ce « je t’aime », c’est précisément le « pain vivant » Jn 6, 50ss qui donne la vie dont parle Saint Jean dans l’Evangile de ce matin.
Ce « je t’aime », c’est précisément ce à quoi nous essayons de répondre par toute notre vie, pour que toute notre vie devienne eucharistique, pour que toute notre vie devienne un immense merci adressé à Dieu, pour que toute notre vie participe à construire le monde comme un village olympique où se côtoient fraternellement toutes les différences , toutes.
Sur ce terrain-là, Morgan, et Elie, et chacune et chacun d’entre nous, je l’espère, je le crois : nous sommes déjà tous médaillés et sur la même marche du podium. Pas parce que nous sommes les meilleurs, mais simplement parce que nous sommes infiniment aimés… et que nous cherchons à donner le meilleur de nous-mêmes en retour, de plus en plus, comme tous les athlètes. 
Allez, « Dieu réunit ceux qui s’aiment » comme l’a splendidement chanté il y a deux semaines Céline Dion du haut de la Tour Eiffel en reprenant L’hymne à l’amour de la grande Edith Piaf. Allez, allez, « Dieu réunit … ceux qui s’aiment ». Tout un programme !
La première partie des JO se terminent mais tout commence encore : « il est long le chemin qui nous reste ».
« Dieu réunit … ceux qui s’aiment ».

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