Noël, c’est bientôt, dans un peu plus de deux semaines. Je crois bien que personne ne l’oublie, n’est-ce pas les enfants ? ça se prépare dans les familles. Chacun de nous a bien sa petite idée déjà pour faire de Noël, une belle et bonne fête.
Savez-vous que dans l’église, chaque dimanche, on peut prendre également de bonnes idées pour bien préparer Noël ? J’en ai retenu une, une idée qu’on n’aurait pas trouvée tout seul. Cette bonne idée, la voici : voulez-vous bien préparer Noël ? Il faut accepter depasser par le DÉSERT.
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Vous me direz, drôle d’idée ! C’est pour le moins inattendu ! Pas plus inattendu que ce que ce que saint Luc nous raconte dans l’évangile de ce dimanche. Souvenez-vous. Il met sur le devant de la scène tous les responsables politiques et religieux du moment. L’empereur romain Tibère, son représentant en Judée, Ponce-Pilate, Hérode, prince de Galilée et d’autres petits rois des provinces voisines. Et aussi les autorités religieuses, Anne et Caïphe. Face à ce décor des puissants qu’on imagine sous les brocards et les chapes dorées, dans les palais et dans les temples, un homme, tout simple, il s’appelle Jean. Il vit dans le désert. Eh bien ! nous dit saint Luc, « La Parole de Dieu fut adressée à Jean dans le désert. » Ni dans le Temple, ni dans les palais, dans le désert. Il doit y avoir un secret là-dessous. C’est sans doute que c’est dans le désert que la Parole de Dieu pouvait être le mieux entendue.
C’est pourquoi, je l’affirme, il faut que nous allions dans le désert pour entendre ce que Dieu veut nous dire pour bien fêter Noël.
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Mais, quel désert ? Pas question de consulter une agence de voyage pour aller dans le Sud Saharien ! Le désert où Dieu nous parle, il est en nous. Je m’explique.
Le désert est synonyme de silence. Aller dans le désert, c’est trouver le silence. Le silence, c’est important Non, c’est essentiel ! Vous le savez bien, vous les mamans, après la précipitation du matin, quand vous avez conduit les enfants à l’école, Ouf ! un peu de calme, de silence. Je me retrouve, dites-vous, pour réfléchir, pour prier parfois.
Quand j’étais à Saint-Nicolas, en plein centre ville de Nantes, je connaissais des employées de magasin qui, chaque soir, à la fin de leur journée, s’arrêtaient dans l’église pour faire silence, pour prier, avant de prendre le bus ou le tram qui les ramenait chez eux.
Jean-Louis Etienne, vous le connaissez, c’est ce chercheur qui a passé des mois sur son traîneau dans le désert glacé de l’Antarctique. Écoutez ce qu’il a dit à son retour : « Nous sommes trop sollicités dans ce monde qui va trop vite. Nous ne prenons pas le temps de nous arrêter, de faire silence pour qu’enfin nous puissions nous poser la question de savoir si la vie que nous menons est bien accrochée à l’essentiel. » Et il a ajouté cette confidence : « C’est dans cette solitude du désert glacé que Dieu a resurgi dans ma vie, après avoir été longtemps caché derrière un paravent de ’bondieuseries”. »
Il faut faire des moments de désert, si l’on veut rester un homme, une femme, dans le tourbillon de la vie, et si l’on veut rester croyant. Il faut descendre de temps en temps, comme on l’a joliment écrit, dans la « crypte » de son coeur. Noël, c’est la visite de Dieu dans nos coeurs. Mais, si nous ne sommes pas chez nous, la visite n’aura pas lieu !
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Je ne peux pas m’empêcher de penser maintenant à un autre désert, celui-là que l’on ne choisit pas mais que l’on subit. J’ai encore dans l’oreille ce coup de téléphone d’une femme, une maman de trois enfants. Elle venait de recevoir les mauvais résultats d’une analyse du laboratoire médical, paniquée à la perspective d’une récidive de cancer. « Vous êtes prêtre, dites-moi, où est Dieu, que fait-il ? J’ai l’impression qu’il se tait dans ce désert que je traverse ! »
Mes amis, j’ai dit, tout à l’heure, que Dieu parle dans le désert. Mais, est-il là dans le désert terrible de la maladie ? dans le désert brûlant de la mort ? parle-t-il dans le désert glacial de la solitude ou le désert aride de l’échec professionnel ou du chômage ?
Le Dieu que l’on va célébrer à Noël, c’est le Dieu qui s’est fait l’un d’entre nous. Jésus dont nous allons célébrer la naissance est venu nous dire que Dieu était avec nous tous les jours même dans les pires moments.
Vous connaissez sûrement ce poème brésilien où l’auteur raconte : « J’ai fait un rêve. Je cheminais sur le plage, côte à côte avec le Seigneur. Nos pas se dessinaient sur le sable laissant une double empreinte. Puis, me retournant, j’ai imaginé que tous ces pas représentaient tous les jours de ma vie. Mais, je remarquai qu’en certains endroits, au lieu de deux empreintes, il n’y en avait qu’une. Les traces à l’empreinte unique correspondaient aux jours les plus sombres de mon existence, jours d’épreuve, jours intenables. Je fis ce reproche au Seigneur : Tu nous avais promis d’être avec nous tous les jours, pourquoi m’avoir laissé seul aux pires moments de ma vie ? Mais le Seigneur m’a répondu : « Les jours où tu ne vois qu’une trace sur le sable, ce sont les jours où je t’ai porté »
Merci à ce poète de nous redire joliment la foi des chrétiens.
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Mais il y a tant de gens qui traversent leur propre désert sans savoir jamais que Quelqu’un peut les y accompagner Qui leur dira ? Nous ! Oui, le Christ nous envoie le leur dire. Comment ? Par nos paroles ? Pas forcément. Par nos actes sûrement.
Laissez-moi vous raconter cet épisode qui s’est passé précisément, ici, dans les rues de cette paroisse Saint-Marc. C’est un prêtre ami qui me l’a raconté. Comment cet homme de ce quartier Malakoff est-il venu sonner à la porte d’une paroisse du centre ville ? Il est venu dire sa misère et surtout son horrible solitude. « Je ne connais absolument personne, je ne supporte plus de n’exister pour personne » Le prêtre l’a écouté. L’homme est reparti, peut-être un peu apaisé. Il a emporté l’adresse du prêtre. Le samedi matin, mon ami reçoit une lettre : « C’est trop tard, je n’en peux plus, vous ne me verrez plus, je vais me supprimer »
Le lendemain, dimanche, après les messes de la matinée, le prêtre est allé déjeuner dans une famille amie. Il leur a lu la lettre. «Comment, tu n’y es pas allé ? On n’a pas le droit de rester ici, il faut y aller. » Ils sont partis à trois : l’homme, la femme, et mon ami prêtre. Ils ont sonné à la porte, bien inquiets de n’avoir aucune réponse. L’homme était là pourtant. Il a fini par ouvrir. Un regard absent, peu de paroles. La dame avait apporté la moitié du pot au feu prévu pour le repas de midi. L’homme a petit à petit cessé de regarder le sol et la boite de médicaments à côté de son lit. Il a même souri. Il a su qu’il n’était plus tout seul.
Ceci se passait au mois de février, on était bien loin de Noël, me direz vous. Pourtant il me semble que jamais cette femme, cet homme et ce prêtre n’ont mieux préparé Noël que ce jour là, en ouvrant le chemin du Seigneur dans le désert qu’un de leurs frères traversait.
Références bibliques :
Référence des chants :