« Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. »

Aimer pour mettre en pratique.  Et mettre en pratique en aimant. Telles me semblent être le cœur de cette Parole de Dieu que nous venons d’entendre avec beaucoup d’intériorité. 
Aimer, facile à dire… Le mettre en pratique, c’est beaucoup plus dur… Mais sans cela, cet amour-là ne sont que des mots.

Le livre du Deutéronome nous donne une clé pour cela : toute mise en pratique commence par l’écoute. 
D’abord écouter la Parole de Dieu. Écouter aussi ce que je suis dans le mystère de toute ma vie, du commencement jusqu’à son terme. Écouter les autres également : mon conjoint, mon enfant, mon père, ma mère, mes frères, mes sœurs. Les écouter dans le réel de leurs vies, en n’imaginant pas ce qu’ils doivent être, mais en aimant ce qu’ils sont. Pour qu’ils deviennent meilleurs. 
Et plus j’écoute pour mieux aimer, plus je suis invité à remonter vers la source de toute relation vraie et humble, celle qu’a vécue par le Christ. 

Si j’écoute le Seigneur, si je l’aime en vérité, il deviendra ma forteresse. 
Et je serai sauvé de mes ennemis, comme nous dit le psaume 17. Comment ? En posant sur eux des actes concrets de respect, de bonté et de pardon. En tentant d’avoir sur ces personnes le même regard que Dieu a sur eux. C’est cela mettre en pratique…

« Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. »
Mais, me direz-vous, comment aimer vraiment son prochain comme nous-mêmes avec tout le poids de nos histoires blessées ?

Quand la lettre aux Hébreux nous invite à avoir les yeux tournés vers le Christ, c’est pour découvrir précisément comment le Christ nous aime. Y compris ceux qui ne nous semblent pas spécialement aimables. Parce qu’ils ont une vie cabossée. Parce qu’ils sont prisonniers de leurs histoires douloureuses. 

En découvrant combien le Christ aime toute personne, nous sommes invités à regarder comment il le met lui-même en pratique. Notamment en nous donnant son pardon, là où nos vies sont blessées. Pour que nous fassions de même.

J’aime bien ce scribe de l’évangile. Il me ressemble. Il nous ressemble. « Bon maître, quel est le premier des commandements ? » La réponse de Jésus est claire : « Mon commandement le voici : aime le Seigneur de tout ton cœur et ton prochain comme toi-même. » 
Il lui commande d’aimer ! C’est étonnant, n’est-ce pas…

Mais c’est pour mieux découvrir combien je suis aimé, gracié. Et aussi comment Dieu Lui-même met en pratique son amour en me pardonnant.

Je peux ne pas douter de Dieu pour m’accorder son pardon quoique j’ai fait. Mais je peux douter de moi-même d’être vraiment capable de recevoir ce don divin. 

A force de donner le sacrement de réconciliation et de le recevoir moi-même, j’aime de plus en plus ce magnifique sacrement. 

Mais cela a été un long chemin pour moi. Parce que je voyais dans mon éducation, ma vie de chrétien, que ce don avait été transformé en un instrument de culpabilisation. Conséquence du jansénisme sans doute qui a fini par me faire croire que je dois pratiquer et faire de bonnes œuvres pour être aimé, sauvé et pardonné ! 

Alors que la foi au Christ me dit exactement l’inverse : parce que je suis aimé et de ce fait parce que je suis pardonné gratuitement par le Christ, qui a donné sa vie pour moi et pour toute personne, c’est pour cela que je suis invité à mettre en pratique ce don, en faisant du bien. En pardonnant à mon tour.

Voyez, je deviens responsable de ce par-don, ce don que je ne peux pas me donner moi-même. Pour vivre autrement. En homme proche du Royaume. 

Quand j’ouvre le sacrement de réconciliation à une personne venant « se confesser », je l’accueille toujours en lui disant : 

Que Dieu vous donne la joie de recevoir sa miséricorde. Elle vous est donnée sans aucune condition. A vous de la transformer en beaucoup de bonté pour les autres et aussi pour vous-mêmes. Car il est important d’être miséricordieux envers soi-même pour pouvoir l’être avec les autres !

Et je comprends mieux combien je suis responsable de ce don reçu quand je prends l’image du rugby. Je l’ai un peu pratiqué quand j’étais ado. Quand on marque un essai -c’est le pardon-, il faut transformer l’essai : c’est notre mise en pratique, notre responsabilité. Ce don m’invite à me consacrer moi aussi, comme le Christ, au service des autres. A leur faire du bien.

Oui, tout cela vaut mieux que tous les sacrifices. Et cela me rapproche du Royaume de Dieu. Me rapproche de moi-même et de mes compagnons de vie que j’ai appris à regarder comme Dieu les regarde. Jusque dans le pardon.

« Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. »

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