Les belles histoires qu’on nous racontait dans notre enfance commençaient souvent par ces mots : « Il était une fois... ».  Or, fait remarquer la rabbin Delphine Horvilleur , il faudrait logiquement dire : « Il fut une fois ». Le passé simple évoque un événement qui s’est déroulé une fois dans le passé. L’imparfait évoque normalement un fait qui se reproduit à de multiples reprises.
Pourquoi donc cet imparfait « Il était une fois... » ? Parce que ces belles histoires racontent au passé ce qui, en fait, existe dans le présent, se prolonge dans notre histoire. Les contes, sous le prétexte de raconter des histoires, nous aident à comprendre le monde, et à nous comprendre nous-mêmes dans notre humanité, avec ses richesses et ses fragilités.
Alors, laissez-moi vous raconter la belle histoire de l’eucharistie et vous évoquer comment elle nous aide à comprendre le monde.

On pourrait effectivement raconter la dernière Cène en commençant par « Il était une fois ». Car cet événement du passé continue à vivre dans le présent, quand les communautés chrétiennes célèbrent l’eucharistie. Au cœur de la prière eucharistique, le prêtre raconte les mots et les gestes de Jésus au soir du Jeudi-Saint. Et en le racontant, il rend vivant aujourd’hui le don du Christ. « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour » (Jn 6,54).
« Il était une fois... » De dimanche en dimanche, nous racontons la Cène. Et, d’eucharistie en eucharistie, ce récit réalise au milieu de nous ce qu’il évoque, et il nourrit notre communion intime au Seigneur de la vie : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui » (Jn 6,56). C’est la force des récits, et la puissance de la Parole de Dieu.

« Il était une fois... » Je vous ai dit que les contes nous aident aussi à comprendre le monde. En quoi l’eucharistie que nous célébrons nous aide-t-elle à donner du sens au monde et à la destinée de l’humanité ?
1° Elle vient nous rappeler que Dieu est avec nous sur le chemin de notre vie, qu'il nous accompagne comme le peuple d'Israël au désert de l'Exode, et qu'il nous prodigue la nourriture spirituelle dont nous avons besoin, la nouvelle manne.
Tant de femmes et d’hommes aujourd’hui ont besoin de découvrir la présence de Dieu à leurs côtés dans le long exode de leur vie, besoin d’accueillir la manne spirituelle qui donne la force de vivre et d’aimer. Nos eucharisties doivent être accueillantes à toutes et tous, leur permettre de goûter cette présence de Dieu dans leur vie : « Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur » (Ps 34,9 – refrain du psaume de ce jour).
2° L’eucharistie nous rappelle ensuite que notre vie est faite pour l’éternité, St Jean y insiste avec force dans le discours sur le Pain de Vie. Notre société est marquée par l'immédiateté du temps présent, nous sommes à l’affût de la moindre notification sur notre téléphone portable... Alors que la destinée de l’homme est vocation à l’éternité.
Nos vies ont-elles déjà une saveur d’éternité ? Pas seulement une espérance d’éternité pour l’avenir, mais déjà un goût d’éternité dans l’aujourd’hui de nos existences. Ils sont nombreux, les signes d’éternité dans notre monde, parfois tout simples comme le regard que s’échangent deux amoureux, ou le sourire émerveillé d’un enfant. Offrons ces signes d’éternité comme une espérance pour l’humanité, qui donne du sens à l’existence humaine.
3° Et enfin, la 1e lecture, tirée du Livre des Proverbes, nous rappelle que c’est la Sagesse qui nous invite à partager son repas, et que ce repas est le « chemin de l’intelligence » (Pr 9,6).
Notre monde a besoin de sagesse – et nous chrétiens aussi ! Un brin de sagesse aurait dû faire comprendre aux organisateurs que la fameuse « scène » d’ouverture des JO allait blesser des croyants. Une once de sagesse rappellerait aux puissants que le tribut payé par des femmes, des hommes, des enfants, dans les conflits (en Ukraine, à Gaza et ailleurs) est intolérable. 
Chrétiens, soyons artisans de cette sagesse qui apaise, réconcilie, construit la fraternité. C’est un service à rendre à l’humanité : « vivez comme des sages », nous invite Paul (Ep 5,14).

« La veille de sa Passion, la nuit de la dernière Cène... »  Chaque fois que le prêtre prononce ces mots au cœur de l'assemblée eucharistique, nous manifestons la fidélité de Dieu et nous ravivons l'espérance.
« Il était une fois » ... hier et aujourd’hui ... depuis 2000 ans... Au cœur de notre société, trépidante, prise par tant d’autres préoccupations, nos assemblées eucharistiques viennent témoigner que nos vies ont déjà un goût d’éternité, et que l’existence humaine a un sens, une vocation à aimer et être aimé, éternellement.

 

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