Chercheurs de Dieu
Ainsi donc, frères et sœurs, nous avons trois personnages fort étonnants. Même en dépouillant les rois mages du « rois » qui n’est pas dans l’Évangile — pas plus que leurs prénoms ni même leur nombre —, même ainsi, ils restent étonnants. « Des mages venus d’Orient ». Qui suivent une étoile. Qui cherchent un roi. Qui trouvent un nouveau-né…
Du temps que je n’étais pas barbu, lorsque j’avais vingt ans ou à peu près, il m’est arrivé de suivre une étoile. L’étoile en question était la constellation d’Orion. Pour ceux qui connaissent la nuit et les étoiles, vous aurez compris que nous étions au milieu de la nuit, en hiver, dans une plaine, et que, tout comme les mages, nous marchions vers l’ouest. La plaine était celle de la Beauce et nous étions une poignée d’amis qui nous étions mis en tête de faire le pèlerinage de Chartres en plein mois de janvier. Nous marchions sans rien dire, d’abord parce que nous étions fatigués, ensuite parce que la route était longue.
Et comme tous les pèlerins, nous demandions, chacun dans son secret, tout en relevant notre col contre le froid, ce que nous cherchions par ce pèlerinage. Pourquoi nous nous escrimions à butter dans les fondrières gelées, tandis qu’au loin clignotaient les pylônes électriques, au lieu d’être restés dans le confort de nos maisons. Qu’est-ce peut chercher le cœur d’un garçon de vingt ans ? La Vierge Marie ? Une révélation personnelle ? Le pardon ? La force ? Que quêtions-nous ? Un miracle ? Une certitude ? Je ne le sais toujours pas…
Ce que je sais, c’est que ce pèlerinage de jeunesse m’a toujours paru ensuite être le résumé de ma vie. Se lever, se mettre en route, avancer, guetter les signes parmi d’autres signes qui peuvent égarer, et se demander vers quoi ou vers qui ces signes m’attirent. Non seulement de ma vie, mais de celle de tous les chrétiens. Chrétiens, nous avons des signes. On nous a dit qu’un Sauveur était né, quelque part, loin, il y a longtemps. On nous a dit que des signes ont été donnés. On nous a dit des choses fragiles, d’incroyables promesses. Et nous marchons.
Notre marche est lente. Il peut arriver que nous nous égarions. Souvent notre courage faiblit. Et nous ne sommes pas bien sûrs de que nous cherchons. L’amour, sans doute ; la vérité, peut-être ; Dieu — mais qui peut dire qui est Dieu ?
Les mages n’avaient pas la vérité et ne connaissaient pas Dieu. Ils n’étaient même pas juifs. Mais les mages cherchaient la vérité. Ils désiraient assez la vérité pour s’être émus d’une étoile nouvelle. Et nous, chrétiens, sommes semblables aux mages. Nous cherchons Dieu. Nous cherchons Dieu parmi les signes qui scintillent dans la vastitude de la nuit. Une parole, un sourire, une amitié nous a fait nous lever. Quelquefois nos pas sont lourds et notre cœur empli de doutes, même si n’osons pas le dire à quiconque, pas même à nos compagnons de route. Quelquefois, au contraire, le but semble tout proche et nous courons, si légers que nos pas sont comme portés, entraînant les autres avec nous. Nous sommes tout près, nous touchons les flèches de la cathédrale de Chartres, nous touchons la porte, nous touchons l’amour, nous touchons le visage du Christ…
Être chrétien, c’est cela. Se mettre en marche. Aller de l’avant, si peu que nous sachions de ce que nous cherchons vraiment. Soutenir nos compagnons, passer les obstacles épaule contre épaule avec eux, lever les yeux vers l’étoile et espérer. Bientôt Jésus verra arriver à lui d’autres mages, tous maladroits, tous remplis d’espoir : les disciples, les pauvres et les malades, les assoiffés de justice et d’amour, les centurions, les pécheresses, les juifs, les païens, des nations entières, nous tous, l’immense peuple des chercheurs de Dieu, l’immense peuple des mages qui s’est levé à la vue de l’étoile et qui, depuis, marche sans trêve dans la nuit de ce monde.
Ainsi donc, frères et sœurs, nous avons trois personnages fort étonnants. Même en dépouillant les rois mages du « rois » qui n’est pas dans l’Évangile — pas plus que leurs prénoms ni même leur nombre —, même ainsi, ils restent étonnants. « Des mages venus d’Orient ». Qui suivent une étoile. Qui cherchent un roi. Qui trouvent un nouveau-né…
Du temps que je n’étais pas barbu, lorsque j’avais vingt ans ou à peu près, il m’est arrivé de suivre une étoile. L’étoile en question était la constellation d’Orion. Pour ceux qui connaissent la nuit et les étoiles, vous aurez compris que nous étions au milieu de la nuit, en hiver, dans une plaine, et que, tout comme les mages, nous marchions vers l’ouest. La plaine était celle de la Beauce et nous étions une poignée d’amis qui nous étions mis en tête de faire le pèlerinage de Chartres en plein mois de janvier. Nous marchions sans rien dire, d’abord parce que nous étions fatigués, ensuite parce que la route était longue.
Et comme tous les pèlerins, nous demandions, chacun dans son secret, tout en relevant notre col contre le froid, ce que nous cherchions par ce pèlerinage. Pourquoi nous nous escrimions à butter dans les fondrières gelées, tandis qu’au loin clignotaient les pylônes électriques, au lieu d’être restés dans le confort de nos maisons. Qu’est-ce peut chercher le cœur d’un garçon de vingt ans ? La Vierge Marie ? Une révélation personnelle ? Le pardon ? La force ? Que quêtions-nous ? Un miracle ? Une certitude ? Je ne le sais toujours pas…
Ce que je sais, c’est que ce pèlerinage de jeunesse m’a toujours paru ensuite être le résumé de ma vie. Se lever, se mettre en route, avancer, guetter les signes parmi d’autres signes qui peuvent égarer, et se demander vers quoi ou vers qui ces signes m’attirent. Non seulement de ma vie, mais de celle de tous les chrétiens. Chrétiens, nous avons des signes. On nous a dit qu’un Sauveur était né, quelque part, loin, il y a longtemps. On nous a dit que des signes ont été donnés. On nous a dit des choses fragiles, d’incroyables promesses. Et nous marchons.
Notre marche est lente. Il peut arriver que nous nous égarions. Souvent notre courage faiblit. Et nous ne sommes pas bien sûrs de que nous cherchons. L’amour, sans doute ; la vérité, peut-être ; Dieu — mais qui peut dire qui est Dieu ?
Les mages n’avaient pas la vérité et ne connaissaient pas Dieu. Ils n’étaient même pas juifs. Mais les mages cherchaient la vérité. Ils désiraient assez la vérité pour s’être émus d’une étoile nouvelle. Et nous, chrétiens, sommes semblables aux mages. Nous cherchons Dieu. Nous cherchons Dieu parmi les signes qui scintillent dans la vastitude de la nuit. Une parole, un sourire, une amitié nous a fait nous lever. Quelquefois nos pas sont lourds et notre cœur empli de doutes, même si n’osons pas le dire à quiconque, pas même à nos compagnons de route. Quelquefois, au contraire, le but semble tout proche et nous courons, si légers que nos pas sont comme portés, entraînant les autres avec nous. Nous sommes tout près, nous touchons les flèches de la cathédrale de Chartres, nous touchons la porte, nous touchons l’amour, nous touchons le visage du Christ…
Être chrétien, c’est cela. Se mettre en marche. Aller de l’avant, si peu que nous sachions de ce que nous cherchons vraiment. Soutenir nos compagnons, passer les obstacles épaule contre épaule avec eux, lever les yeux vers l’étoile et espérer. Bientôt Jésus verra arriver à lui d’autres mages, tous maladroits, tous remplis d’espoir : les disciples, les pauvres et les malades, les assoiffés de justice et d’amour, les centurions, les pécheresses, les juifs, les païens, des nations entières, nous tous, l’immense peuple des chercheurs de Dieu, l’immense peuple des mages qui s’est levé à la vue de l’étoile et qui, depuis, marche sans trêve dans la nuit de ce monde.