Après avoir écouté la Parole de Dieu nous risquons de nous alarmer et de nous inquiéter sur son exigence. Cette exigence porte sur des engagements, un chemin à prendre qui pourrait se résumer à une attitude : devenir de plus en plus semblables à Jésus en le suivant, en marchant pas à pas derrière lui.
Dès la première lecture la voix du prophète Jérémie fait entendre sa plainte : il est devenu prophète par la volonté de Dieu, il est fidèle à Dieu mais il porte une Parole qui est rejetée parce qu’elle demande au peuple de se convertir. Or, il ne peut pas taire cette Parole que Dieu met dans son cœur.
C’est une Parole de feu, qui le consume sans cesse. Il vit là le drame du croyant inspiré par l’Esprit -Saint. Dieu, pour annoncer au monde sa Parole, a choisi une Parole plus forte que tout, cette Parole c’est son fils, c’est Jésus. Cette Parole ne peut s’enraciner que dans un cœur qui écoute, un cœur qui est en attente : le psaume traduit ce besoin du croyant qui a soif de Dieu et qui le cherche avec force. La deuxième lecture tirée de la Lettre de saint Paul aux Romains décrit la démarche intérieure, spirituelle qui répond à la Parole de Dieu : il s’agit de « transformer » notre pensée pour la faire coïncider avec la volonté de Dieu et, ensuite, agir en faisant la volonté divine. Comme Jésus nous l’apprend ne disons-nous pas dans le Notre Père « que ta volonté soit faite » ? Jésus peut reconnaître en toute personne qui fait la volonté de Dieu « un frère, une sœur, une mère » (Matthieu 12,50)
Pour être ce fidèle qui vit selon la Parole de Dieu, pour offrir sa personne tout entière au Père il n’y a qu’un chemin : celui que le Fils a pris et qu’il nous montre. Dans l’évangile nous avons entendu que Jésus annonce le chemin qu’il prend : au sens matériel, ce chemin c’est la montée à Jérusalem parce que son sacrifice ne peut s’accomplir que là. Jésus précise les actes du drame : souffrir, mourir, ressusciter. Il connaît son destin. Mais il se heurte à Pierre qui refuse cette perspective. Le combat apparaît ici entre la logique des hommes et la logique de Dieu et il fait écho à ce qui précède dans les lectures de ce jour : la Parole de Dieu acceptée ou refuser par l’homme et la nécessité de choisir le chemin de Dieu qui est toujours un chemin de croix. Pierre ne veut pas que Jésus connaisse l’épreuve de la Passion qu’il ne comprend pas et se met en avant pour barrer le chemin. Jésus le fait passer derrière pour lui montrer qu’il a à suivre et non à guider. Le disciple marche derrière le maître, il passe par là où passe le maître : la souffrance, la mort, la gloire avec le maître. Le renoncement à notre propre volonté, l’acceptation de notre croix personnelle et quotidienne, la suite aimante de Jésus, voilà l’itinéraire du chrétien. L’acte de foi n’est pas une proclamation ou le développement d’une idée c’est prendre résolument à la suite de Jésus la route du renoncement à soi, du don de soi, de manière inconditionnelle et indéterminée : c’est la voie supérieure dont parle saint Paul (1Co12,31 -13,13) : l’amour par lequel j’aime Dieu et mon prochain. Cette voie mène au Père, elle me comble peu à peu de la présence du Fils et me fait vivre dans l’Esprit-Saint. Elle ne passera pas parce qu’elle s’accomplit en vie éternelle.
La Parole de Dieu que nous venons d’entendre est une invitation à faire le choix juste : d’abord à connaître cette Parole, c’est-à-dire à être familier de Jésus, à se nourrir des sacrements, à agir selon l’Esprit-Saint dont nous avons reçu les dons. Mais, surtout, faire de notre vie « une louange à la gloire de Dieu » et la construire non pas sur ce que nous allons laisser en quittant ce monde mais sur le trésor de la foi vécue et pratiquée au quotidien. Alors nous pourrons recevoir un trésor plus grand encore la vie dans la lumière de Dieu. Déjà cette lumière brille dans l’eucharistie, accueillons-la.