Qu’est-ce qui a permis cette rencontre entre Jésus et la Samaritaine ? Un puits ! Un puits sur la margelle duquel un homme fatigué est venu s’asseoir et dans lequel une femme venait de puiser de l’eau.
Je vois là un magnifique symbole de nos existences de chrétiens : nous sommes appelés à être des puits, des lieux, des personnes qui permettent la rencontre entre le Christ et tous les assoiffés d’aujourd’hui.
Certains d’entre vous réagissent peut-être en pensant : ce n’est pas tellement d’être un puits qui compte, mais de contenir de l’eau et de la bonne ! Et nous l’avons cette bonne eau : c’est l’Eau vive qui a jailli en nous à notre baptême et que nous voulons proposer aux autres. Oui, mais beaucoup, me semble-t-il, sont souvent très pressés, trop pressés. Voulant être sûrs qu’ils évangélisent, ils veulent dire tout de suite qu’ils sont croyants. Ils pensent qu’il faut parler tout de suite du Christ, de l’amour de Dieu, qu’il faut oser dire notre foi… Dans une telle hâte, ils risquent de court-circuiter la rencontre. Elle est indispensable pour que l’autre se sente accueilli, écouté, aimé, respecté. Avant de parler de l’Évangile puis de le proposer, nous devons le vivre avec ceux que nous rencontrons.
Nous aurions beau avoir l’Eau vive du baptême, si nous ne favorisons pas d’abord une vraie rencontre fraternelle et gratuite, les conditions pour que notre interlocuteur découvre le Christ manqueront.
Il nous faut donc être un puits, un lieu, une personne de rencontre.
Est-ce que nos vies, nos styles de vie permettent la rencontre, permettent toutes les rencontres ? Pas seulement avec celles et ceux que nous aimons ou qui nous sont sympathiques, ou qui pensent comme nous. Notre mission chrétienne réclame que nous soyons disponibles pour toutes les rencontres et que nous suscitions de vraies rencontres.
Nos paroles et nos comportements sont importants. Jésus n’a pas commencé par enseigner la doctrine, ni par faire la morale à la Samaritaine. Il n’a pas commencé par lui dire : « Tu as eu une vie conjugale quelque peu dissolue. Quand tu changeras de vie, je t’aimerai. » Il lui a parlé alors que Juifs et Samaritains ne se parlaient pas. Il lui a demandé un service, Il lui a révélé qu’il était le Messie, il lui a fait comprendre la véritable adoration. Tout cela gratuitement, sans condition, respectant pleinement la liberté de cette femme. Il l’a aimée telle qu’elle était. Il ne l’a pas enfermée dans son passé. Il lui a fait confiance. Il a espéré en elle. La Samaritaine a pu alors dire sa foi dans le Messie et elle est devenue missionnaire.
Si nous refusons de rencontrer une personne ou de lui parler, ou que nous nous méfions d’elle à cause de son comportement ou de sa religion, ou de son orientation sexuelle ; si nous voulons d’abord qu’elle change de vie pour lui proposer l’Évangile et la mettre en contact avec l’Église, nous ne pouvons pas être pour elle un puits de Jacob, le puits de la rencontre avec Jésus.
Vous êtes catéchumènes, appelés récemment par l’Église et en vous bientôt jaillira la source d’Eau vive, vous êtes chrétiens, vous êtes jeunes ou dans la force de l’âge, ou malades ou affaiblis par le grand âge. Dans notre diversité nous voulons tous et toujours accueillir Jésus qui vient à notre rencontre, de bien des manières : par sa Parole et ses sacrements (comme dans cette Eucharistie), et dans son Corps mystique qu’est l’Église, et dans les pauvres et les faibles auxquels il s’est identifié. En même temps, nous devons reconnaître aussi que nous sommes tous d’une manière ou d’une autre les Samaritaines d’aujourd’hui. Si nous disons à Jésus : « Donne-moi toujours de cette Eau-là », il fera de nos vies des lieux de rencontre, des puits de Jacob où l’on peut s’asseoir, se parler, offrir l’Eau qui apaise toute soif et surtout rencontrer le Messie.
Références bibliques : Ex 17, 3-7 ; Ps. 94 ; Rm 5, 1-2.5-8 ; Jn 4, 5-42
Référence des chants : Liste des chants de la messe à Nanterre 23 03 14