Le baptême du Seigneur marque plusieurs ruptures dans la manière que Dieu a choisie pour se faire connaître des hommes. Ce sont des ruptures car, après le baptême de Jésus, plus rien ne sera comme avant. Et nous tous qui sommes devenus chrétiens par le baptême, nous essayons aujourd’hui de vivre de ces ruptures. Voyez plutôt.
Tout d’abord, il y a ce fait très étonnant : Jésus a été baptisé par Jean. Jésus entre dans l’histoire de l’Humanité en se faisant solidaire de son attente de jours meilleurs. Il se met dans la file de ceux qui cherchent à se convertir, en demandant à recevoir un baptême de purification pour se détourner du mal et accueillir le règne de Dieu, enfin tout proche. Jésus, l’homme qui ne connaît pas le péché, aurait pu légitimement se dispenser de recevoir le baptême, ou il aurait pu faire semblant de le recevoir sans faire sienne la démarche de ceux qui venaient à Jean. Eh bien non. Le Fils de Dieu n’arrive pas en surplombant notre humanité ou en la méprisant. Son premier geste dit une proximité, non feinte, avec l’Humanité telle qu’elle est. Non pas une humanité réduite à ses péchés, mais une humanité essentiellement en attente et en quête d’un autre monde meilleur pour tous. Cette absence de jugement, pour préférer une juste compassion, faite de sympathie et de tendresse, est la première rupture introduite par le baptême du Seigneur.
Aussi, quand vous entendez quelqu’un se raidir dans ses propos sur le monde ou sur certaines personnes, et cela peut nous arriver à nous aussi, une chose est sûre : cette personne a oublié ce que signifie le baptême.
Luc écrit, qu’après avoir été baptisé, « Jésus priait. Le ciel s’ouvrit ». Comment mieux rappeler que le propre de toute rencontre avec Dieu, ce face à face que chacun de nous vit dans la prière, est d’ouvrir et non de fermer ? Voici une deuxième rupture : la frontière qui sépare la terre du domaine où Dieu réside est ouverte une fois pour toutes. Elle ne se refermera jamais. Le baptême nous fait entrer dans une relation personnelle avec Dieu et non pas adhérer à des valeurs, à des idées ou à des vérités. Et cette relation se reconnaît par ce qu’elle ouvre en chacun de nous : une espérance nouvelle, une charité plus grande, une foi qui fait dépasser ses peurs.
Aussi, quand vous entendez quelqu’un réduire le christianisme à des points qui empêchent tout dialogue, et cela peut nous arriver à nous aussi, une chose est sûre : cette personne a oublié ce que signifie le baptême.
Autre rupture et non des moindres : une voix venue du ciel, désormais ouvert. « En toi, je trouve ma joie. » Vous entendez ? C’est inouï ! En Jésus, son Fils, qui s’est voulu solidaire de chacun de nous, Dieu, le Père, trouve sa joie. Êtes-vous prêts à croire, vous aussi, que lorsque vous vivez de façon accordée à votre baptême, Dieu trouve en vous sa joie ? Vous ouvrez votre table à l’étranger ? Dieu trouve sa joie ! Vous contribuez à faire de l’Église un « hôpital de campagne », en soignant les blessés de la vie ? Dieu trouve sa joie !
Aussi, quand vous entendez quelqu’un annoncer un christianisme intransigeant sans douceur ni réconfort, et cela peut nous arriver à nous aussi, une chose est sûre : cette personne a oublié ce que signifie le baptême.
Au final, ces ruptures introduites par le baptême du Seigneur convergent vers une seule rupture dans nos vies : devenir miséricordieux comme le Père est miséricordieux. Se faire proche de tout homme avec sympathie, comme Dieu. Ouvrir des chemins qui font grandir, comme Dieu. Et surtout, vivre de la joie de Dieu avec le Christ, trop heureux de retrouver tant de fils qui s’étaient égarés.
Références bibliques : Isaïe 40, 1-11; Ps.103 ; Lettre de saint Paul à Tite 2, 11-14 ; 3, 4-7 ; Évangile selon saint Luc 3, 15-22
Référence des chants : Liste des chants de la messe à Fréjus 10 janvier 2016