La fête de la Toussaint célèbre la puissance de la foi en Jésus Christ à travers l’histoire de l’homme. C’est la fête de la communion des saints.
Ces lectures de l’Écriture décrivent la charte de cette Communion. Elles montrent que nous sommes déjà, en partie, membres de cette Communion et font allusion à la purification que nous vivons sur la route de notre vie. Les années, les vallées et les collines de cette purification « esquissent l’image du Christ » dans notre personne, pour reprendre les termes de saint Colomban, dont l’héritage est célébré, ce mois-ci, dans de nombreuses paroisses et communautés à travers l’Europe et sur d’autres continents, grâce au travail des sœurs, père et laïcs missionnaires de Saint-Colomban. Saint Colomban, « l’irlandais le plus connu du Moyen-Âge » comme l’a décrit le pape Benoît XVI, connaissait ces passages de l’Écriture.
Né près de Myshall, dans le sud-est de l’Irlande, en 543, il a passé du temps dans le monastère de Saint-Sinell à Cleenish, sur les rives du Lough Erne, dans le comté de Fermanagh. Après y avoir appris le latin et le grec, il part pour le célèbre monastère de Saint-Comghall et sa rigoureuse Règle, à Bangor, où il est ordonné prêtre. De là, il part en « pèlerinage pour le Christ », avec douze compagnons. Dans la première partie de sa pérégrination, il fonde des monastères à Annegray, Luxeuil et Fontaine en France.
La seconde partie de son voyage le conduit, via la Moselle et le Rhin, jusqu’à l’actuelle Suisse, où son compagnon Gall fondera le monastère de Saint-Gall. Saint Colomban traverse le lac de Constance, vers Bregenz, où il y passe peu de temps, avant de franchir les Alpes jusqu’à Milan. Là, il prêche ses « Instructions spirituelles », qui existent toujours, avant de partir pour Bobbio, où il fonde son dernier et célèbre monastère et où, selon Jonas de Suse, auteur d’une « Vie de saint Colomban », et moine de Bobbio, il meurt le 23 novembre 615.
Cette année, des communautés chrétiennes, de Bangor à Bobbio, associées à la famille spirituelle de Saint-Colomban, ont fêté sa préoccupation constante pour la tradition chrétienne et la culture européenne.
Des chrétiens se sont retrouvés dans des célébrations œcuméniques en Irlande, à Cleenish, Bangor et Armagh, pour redécouvrir la nature prophétique du témoignage et des écrits de ce moine-missionnaire, qui datent d’avant la séparation des Églises d’Orient et d’Occident, et la Réforme.
Trois colloques académiques, à Bangor, à Luxeuil, puis, ce mois-ci, à Bobbio en Italie, ont rassemblé des universitaires et des chercheurs, des historiens, des archéologues, des théologiens, des philologues, des paléographes, pour étudier saint Colomban, son monde et son époque, ses écrits, ses fondations monastiques et leurs multiples influences. Les outils contemporains de recherche interdisciplinaire et les bourses d’étude continuent de révéler le courage spirituel et moral de cet irlandais, nourri par le désir ardent de faire connaître le nom du Christ et l’Évangile de la vie à la Cour et dans les campagnes.
Les mots de son treizième sermon : « Soyons au Christ, car nous ne nous appartenons pas » pointent le cœur de sa prédication centrée sur le Christ.
Ses mots : « Que le Christ, imprime son image en vous », probablement prêchés à Milan en 610, soulignent que le Christ et la grâce de Dieu sont les principaux moteurs de la vie chrétienne. Son introduction sur la pratique de la confession privée et fréquente, avec pénitence, et l’importance de la guérison spirituelle qu’elle offre, résonnent avec l’Année de la miséricorde à venir.
Des thèmes d’une actualité permanente caractérisent ses écrits. En cette année où le pape François a publié son encyclique sur l’écologie, Laudato Si, il convient de rappeler les propos de saint Colomban, issus de son douzième sermon « Sur la foi » : « Ceux qui souhaitent connaître la profondeur de Dieu, disait-il, doivent d’abord connaître la création. »
De même, l’appel de Colomban à respecter la dignité des peuples dans le Christ et dans leurs traditions, nous frappe de façon salutaire, nous, citoyens de l’Europe d’aujourd’hui, avec ses sociétés civiles et ses gouvernements, qui observons et essayons de répondre à l’afflux des réfugiés et migrants provenant de pays dévastés par la guerre. Dans sa Lettre aux évêques de la Gaule, il écrivait : « Nous sommes membres d’un même corps, le Christ, que nous soyons Gaulois, Bretons, habitants de l’Hibernie ou de quelque autre pays ! » Le contexte de cette affirmation était celui de débats intenses entre le moine irlandais du VIe siècle, issu de traditions celtiques et insulaires, et les évêques de la Gaule ; débats relatifs à la diversité des pratiques ecclésiastiques. Son appel à voir chaque personne et les peuples dans l’image du corps du Christ, souffrant et ressuscité, peut inspirer la réponse des citoyens chrétiens et des dirigeants politiques d’aujourd’hui face à la détresse croissante des peuples déplacées, des réfugiés et des migrants.
Mais la fidélité à l’histoire et à ses écrits toujours d’actualité exige que nous comprenions Colomban dans son époque et son contexte. Grâce à ses fondations monastiques et à son organisation de la vie monastique, nous voyons comment la périphérie revivifia le cœur de l’Empire romain. Formé dans les monastères d’Irlande, inspirés des Pères du désert et des premières figures du monachisme occidental, Colomban, avec ses fondations monastiques et sa Règle, a eu, avec saint Benoît, une influence significative et formatrice sur le monachisme médiéval européen.
Mais son influence a également rejoint nos temps modernes, car il est le premier écrivain connu qui a utilisé l’expression « toute l’Europe ». Son héritage et son témoignage ont inspiré Robert Schuman et d’autres fondateurs de la construction européenne, dont les institutions et la politique, certes susceptibles d’amélioration et de développement, demeurent le moyen d’espoir et de solidarité pour les peuples d’Europe et du reste du monde.
Cette fête de la Toussaint nous invite, avec les mots de la Première lettre de saint Jean, à « penser à l’amour dont le Père nous a témoigné pour que nous soyons appelés enfants de Dieu » (1 Jn.3.1). Au sujet de cet amour divin, saint Colomban a écrit les mots suivants qui parlent aux chrétiens de tous temps :
« Seigneur, accorde-moi, je te le demande dans le nom de Jésus Christ, ton Fils, et mon Dieu, cet amour qui ne connaît pas de défaillance, de sorte que ma lampe puisse s’embraser et ne jamais s’éteindre, qu’elle brûle pour moi et soit lumière pour les autres.
Allume, ô Seigneur, ma lampe, qu’elle brille en permanence dans ton Temple.
Que ton amour imprègne chaque fibre de notre être ; que nous soyons tout à toi.
Que ton amour remplisse tous nos sens, de sorte que nous ne puissions rien aimer d’autre que toi qui es éternel. » (Sermon XII. 3)
Références bibliques : Ap 7, 2-4.9-14 ; Ps. 23 ; J 3, 1-3 ; Mt 5, 1-12a
Référence des chants :