Frères et sœurs,
Amis en Christ,
Jésus, les apôtres, la foule : tels sont les trois acteurs de cette belle scène évangélique au bord du lac.
– L’acteur principal : Jésus.
Emu, il regarde cette foule immense en quête d’un pasteur, qui puisse l’instruire et la nourrir. Peut-être, cette foule n’a-t-elle rencontré jusqu’alors que de mauvais bergers, qui auraient mérité les reproches violents du prophète Jérémie. Ils n’ont cherché que leurs intérêts. Ils se sont rempli les poches au détriment des plus pauvres. Ce sont des pasteurs sans conscience, des mercenaires.
Alors, comment résister à tant d’appels qui se lisent sur ces visages, assoiffés d’’espérance ?
– Les apôtres jouent le deuxième rôle.
Jésus les avait envoyés, prêcher, chasser les démons, soulager les malades. Ils ont vécu deux par deux, quelques jours, mais sans Jésus. Epuisés, ils viennent de rentrer, leur besace pleine de joie, de découvertes, d’échecs et de fatigue. Jésus leur propose un temps d’intimité avec lui. C’est dans le silence et la prière que lui-même se repose. De nos jours aussi, de plus en plus de personnes cherchent cette forme de repos dans les monastères, lieux de ressourcement très appréciés.
-Mais c’était compter sans le troisième acteur : la foule.
Elle va rendre ce repos impossible. Elle harcèle Jésus et le presse de toute part. Elle cherche à l’approcher, à l’entendre et à le toucher. Mais la solidarité avec les douze prime. Il s’embarque avec eux pour traverser le lac en escomptant trouver l’oasis qui leur permettra de refaire les forces.
Frères et sœurs, quelle belle image de l’humanité du Christ, qui sait préserver pour ses amis surmenés par le labeur apostolique, le repos et la détente indispensable. Pour assumer sa tâche, Jésus a besoin d’hommes et de femmes équilibrés, sereins et paisibles. Mais la foule, sans GPS, a repéré l’itinéraire. En faisant le tour du lac à pied, elle se paye même le luxe d’arriver avant l’embarcation du Christ. Du coup, les vacances des apôtres tombent à l’eau ! Face à tous ces gens avides, Jésus reprend la prédication, Évangélisation oblige !
Le Christ voit ces foules, celles de son temps et celles d’aujourd’hui. Il est saisi de pitié, car elles sont comme des brebis sans bergers. Alors il prend lui-même le relais. Contrairement aux mauvais pasteurs que fustige le prophète Jérémie, il se dépense corps et âme, sans compter. Il apporte le salut à tous les maltraités de l’existence. Avec lui les muets retrouvent la parole, les sourds entendent et les aveugles voient, les paralysés retrouvent les pas de danse, les lépreux et les marginaux de toute sorte, reprennent leur place dans la société, les parents en deuil quittent leur chagrin en voyant leur enfant échapper à la mort.
Cet évangile est d’une brûlante actualité. Beaucoup de nos contemporains ont perdu leurs repères. Nous vivons dans un monde blessé par les guerres, les violences, le désespoir. La tentation est grande de fuir cette foule inquiète, de nous complaire dans nos célébrations, si belles soient-elles et d’esquiver les solidarités et les engagements au profit des êtres humains. Ce serait une Eglise ghetto pour les bien-pensants ! Certes, nous avons besoin de nous retrouver ensemble, pour célébrer l’eucharistie et nous encourager mutuellement dans la foi. Mais de grâce, ne tournons pas en rond dans nos querelles ecclésiastiques, alors que tant de frères crient leur détresse sur le parvis de nos églises. Notre pape François nous le rappelle : l’Eglise a besoin de « pasteurs avec l’odeur de leurs brebis… pas de brosseurs de brebis ».
Chers amis des maisons du village St Joseph, vous avez merveilleusement construit cet équilibre dans vos petits foyers d’amour, de prière et d’accueil, permettant aux meurtris de la vie, de reprendre confiance et de faire de leur fragilité le secret du don pour l’autre.
Frère, sœur, ami. Jésus te convoque sur la rive des hommes et t’attend au cœur des foules, pour y être le levain qui soulève la pâte. Mets-toi à l’école de Jésus et deviens cet « expert en humanité », disposé à partager les joies, les lassitudes et les questions de tes frères. D’ici quelques jours s’ouvriront les jeux olympiques, sois pour tous les chercheurs de sens, un flambeau d’espérance.