Par Julia Itel – Publié le 28/08/2023

Thérèse d'Avila est une mystique et religieuse espagnole du XVIe siècle. Canonisée en 1622 et proclamée docteur de l'Église, elle est vénérée comme l'une des grandes figures spirituelles de l'Église catholique. 


Qui est Thérèse d'Avila ?

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Enfance et entrée au Carmel

Teresa de Cepeda y Ahumada naît le 28 mars 1515 à Gotarrendura, près d’Avila en Castille. Petite-fille d'un marchand juif converti au christianisme, elle grandit au sein d'une famille nombreuse. Très jolie, la jeune Thérèse aime séduire et être courtisée. En 1531, son père Alonso de Cepeda, l'envoie parfaire son éducation au couvent des Augustines, et ainsi remettre sa fille dans le droit chemin. Appréciant la quiétude de la vie monacale, Thérèse caresse l'idée de devenir sœur, elle aussi, sans pour autant arriver à se décider. Au bout de dix-huit mois, elle tombe malade et son père décide de l’extraire du couvent pour qu'elle puisse faire sa convalescence chez sa sœur. 

Le père et sa fille font une halte chez l’oncle de celle-ci, Pedro de Cepeda, un homme lettré et pieux qui lui fait découvrir les Épîtres de saint Jérôme, Thérèse sent naître en elle le désir d'entrer en religion. C'est parce qu'elle est soucieuse du salut de son âme qu'elle entre, contre la volonté de son père, au couvent de l'Incarnation en novembre 1535. Elle prononce ses vœux perpétuels le 3 novembre 1537.


Entre les choses de Dieu et celles du monde

Les trois années suivantes, Thérèse les passe affligée car elle ne parvient ni à prier ni à s'émouvoir de la Passion du Christ comme les autres moniales. De plus, elle tombe de nouveau malade et souffre de douleurs au cœur, de vomissements et de syncopes. Son père, inquiet, la fait sortir une nouvelle fois du couvent afin de l'amener chez une guérisseuse. Sur le chemin, Thérèse demande à s'arrêter chez son oncle Pedro. Celui-ci, ravi de voir sa nièce qu'il considère presque comme sa fille spirituelle, lui remet un exemplaire du Troisième abécédaire spirituel de Francisco de Osuna qui propose des conseils pratiques pour progresser dans la vie spirituelle, notamment grâce à l'oraison de recueillement, une forme de prière contemplative. Sa méthode permet d'acquérir par la connaissance de soi, la purification de l'âme et la quête de l'union avec Dieu, une expérience personnelle du divin. Cela ne manque pas de plaire à Thérèse qui comprend enfin le véritable sens de sa vie religieuse : rencontrer Dieu

Comprendre l’oraison chez Thérèse d’Avila

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Mais son état empire et les traitements de la guérisseuse n'arrangent pas les choses. Après avoir passé quatre jours dans le coma, Thérèse se réveille paralysée des quatre membres. Elle demande pourtant qu'on la ramène au couvent de l'Incarnation car elle voit dans cette mise à l’épreuve l'intervention de Dieu. Elle commence à prier avec ferveur, à se confesser régulièrement, à communier quotidiennement. Malade depuis trois ans, elle finit par prier saint Joseph de la guérir puis, un matin, miracle ! elle remarche. 

Thérèse retrouve avec enthousiasme une vie sociale au sein du couvent et avec ses nombreux amis qui lui rendent visite et avec qui elle peut s'enquérir des affaires du monde. Elle se passionne pour les récits de la conquête du nouveau monde et tient souvent salon au parloir. Elle entretient même une relation platonique avec don Antonio Aguiar. Bref, les mondanités la détournent de la prière. Elle écrira : « D'un côté Dieu m'appelait, de l'autre je suivais le monde. Je trouvais beaucoup de joie dans les choses de Dieu, et celle du monde me tenait captive. » Ainsi passent les vingt années suivantes de la vie de Thérèse d'Avila.


La conversion de Thérèse d'Avila

En 1554, en contemplant la statue d'un Christ en croix, Thérèse fait l'expérience d'une conversion profonde : « Un jour, comme j’entrais dans l’oratoire, j’y aperçus une statue qu’on s’était procurée en vue d’une fête à célébrer dans le couvent, et qu’on avait placée là, en attendant. C’était un Christ tout couvert de plaies ; et si touchant qu’à le considérer, je me sentis profondément bouleversée, tant il peignait bien ce que Notre Seigneur endura pour nous. Si grande fut ma douleur devant l’ingratitude dont j’avais payé de telles blessures que je croyais sentir mon cœur se briser. Je me jetai auprès de mon Sauveur en versant un torrent de larmes, et le suppliai de me donner en cet instant la force de ne plus l’offenser. » Elle est bouleversée par l'humanité du Christ et par la proximité qu’établit Dieu avec nous en s’incarnant. Elle se consacre alors tout entière à la méditation dans le jardin du carmel. La lecture des Confessions d'Augustin la confirme dans cette voie.


Thérèse d’Avila, la mystique

Dès lors, les visions du Christ se font plus nombreuses pour Thérèse ; elle sent sa présence radieuse et lumineuse tout près d'elle. Elle entre de plus en plus en extase, ce qui finit par éveiller les soupçons (le XVIe siècle est celui de l'Inquisition) : ne serait-elle pas possédée par le diable

Après cinq ans d'observation scrupuleuse et d'enquête, le père Pedro Ibanez finit par reconnaître la véracité de ses grâces mystiques. Puis, à 45 ans, Thérèse vit l'expérience de la transverbération : « J’apercevais un ange auprès de moi, du côté gauche, sous une forme corporelle […] Je voyais entre les mains de l’ange un long dard qui était d’or, et dont la pointe de fer portait à son extrémité un peu de feu. Parfois, il me semblait qu’il me passait ce dard au travers du cœur et l’enfonçait jusqu’aux entrailles. Quand il le retirait, on aurait dit que le fer les emportait après lui, et je restais tout embrasée du plus ardent amour de Dieu. La douleur était si intense qu’elle me faisait pousser ces faibles plaintes dont j’ai parlé. Mais en même temps, la douceur causée par cette indicible douleur est si excessive qu’on aurait garde d’en appeler la fin, et l’âme ne peut se contenter de rien qui soit moins que Dieu même. Cette souffrance n’est pas corporelle, mais spirituelle ; et pourtant, le corps n’est pas sans y participer un peu, et même beaucoup. » 


Réformer le Carmel

Peu de temps après, une vision fulgurante de l'enfer la presse à chercher le salut pour tous les pécheurs. Inspirée par une pensionnaire du couvent, María de Ocampo, lui vient l'idée de fonder un couvent en revenant à la Règle primitive du Carmel, à la manière des déchaussés, c'est-à-dire une vie dédiée à la prière, dans l'isolement et le dénuement total. En effet, insatisfaite de la superficialité et de la mondanité qu'elle observe dans certains couvents carmélites de son époque, qu'elle perçoit comme une détérioration de la vie monastique, elle ressent le besoin de rétablir une vie religieuse plus contemplative et une prière plus authentique. Avec son ami le prêtre carme Jean de la Croix, elle réfléchit à élaborer une règle plus stricte pour les couvents réformés, qui mette l'accent sur la pauvreté, la chasteté, la vie communautaire et la prière contemplative. Ainsi est fondé l'Ordre des déchaux. Cette règle est approuvée par le pape Pie IV en 1569.

Le 24 août 1562 est officiellement fondé le couvent de San José, composé de Thérèse qui se fait désormais appeler Thérèse de Jésus, et de quatre carmélites auxquelles se joignent bientôt cinq autres. Elle confie à Jean de la Croix la direction de la branche masculine. Au couvent des déchaux, le temps d’oraison est très long et entrecoupé de périodes de travaux manuels ainsi que d'une heure de récréation par jour afin de « rendre la vie supportable ». La réputation du couvent dépasse ses murs clos et, rapidement, Thérèse d’Avila est amenée à en réformer et à en ouvrir d'autres. Entre 1567 et 1571, elle fonde dix-sept monastères (Malagón, Valladolid, Tolède, Salamanque, Séville, Ségovie, Soria, Burgos, etc.), comme le décrit dans le Livre des fondations (1573-1582). 


Sainte et docteur de l’Église

Épuisée par les voyages et ses obligations, elle vit les dernières années de sa vie dans une quiétude spirituelle. Elle s'éteint dans la nuit la plus longue de l'histoire, celle du 4 au 15 octobre 1582, au moment où est adopté le calendrier grégorien. Sur son lit de mort, elle sourit, heureuse de retrouver Dieu : « Mon Seigneur et mon Époux, voici enfin venue l'heure désirée ! » 

Elle est béatifiée en 1602 par Paul V, canonisée par Grégoire XV en 1622 puis déclarée patronne de l’Espagne en 1627 par Urbain VIII. Enfin, Paul VI la proclame docteur de l’Église en 1970, en même temps que Catherine de Sienne. 


L’œuvre spirituelle de Thérèse d’Avila

Thérèse d'Avila a laissé un héritage spirituel important à travers ses écrits. Ses œuvres spirituelles reflètent sa profonde expérience mystique et sa recherche d'union avec Dieu. Le Livre de la Vie, écrit entre 1562 et 1565 à la demande de son confesseur, le dominicain Garcia de Toledo, constitue l’ouvrage autobiographique de Thérèse. Elle y raconte sa vie, sa conversion spirituelle, sa quête de Dieu et ses expériences mystiques. C'est un récit intime qui permet aux lecteurs de mieux comprendre son cheminement spirituel.

Le Chemin de perfection est destiné aux religieuses de son ordre. Thérèse y prodigue des conseils pratiques pour avancer sur le chemin de la perfection spirituelle. Elle aborde des sujets tels que la prière, la vie communautaire, la simplicité et la fidélité à Dieu.

Le Château intérieur (ou Le Livre des Demeures), publié de manière posthume en 1588, l'un des ouvrages les plus célèbres de la religieuse. Dans ce livre, Thérèse décrit l'âme humaine comme un château doté de plusieurs « demeures » intérieures, chacune symbolisant un niveau de profondeur spirituelle. Thérèse explore la progression de l'âme vers une union intime avec Dieu à travers la prière et la contemplation. 

À voir « Thérèse d’Avila : le château intérieur »

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