Alors que la Vierge du pilier a regagné Notre-Dame après avoir été accueilli à l'église Saint-Germain l'Auxerrois, découvrez son histoire !

 

Elle est la plus célèbre statue de Notre-Dame de Paris et elle est une miraculée : la Vierge du pilier, ou Vierge à l'Enfant, a tant de choses à nous raconter. Le père Yves Combeau, dominicain et conseiller éditorial au Jour du Seigneur, relate son histoire exceptionnelle.

C’était une semaine après l’incendie de Notre-Dame de Paris. Pour Le Jour du Seigneur, nous entrions dans la cathédrale blessée. Elle était là, contre son pilier du transept à droite du chœur. Déjà enveloppée par le rude carcan de bois qui allait permettre de la transporter à l’abri dans une chapelle latérale. Elle était l’œuvre d’art la plus proche des débris tombés de la flèche. Il aurait suffi de quelques centimètres pour qu’elle fût détruite. Et elle était parfaitement intacte. Un miracle. Un miracle d’autant plus évident qu’elle avait été frôlée ; dans son dos, une poutre enflammée avait laissé une unique traînée noire de quelques centimètres, comme une caresse de charbon, pour dire : « Je brûle, mais je ne t’abîmerai pas. »

La cathédrale Notre-Dame de Paris - série Sanctuaire(s)

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La Vierge du pilier : une statue à la longue histoire

Celle que nous connaissons sous le surnom de « Vierge du pilier » n’a pas toujours été devant son pilier. Elle n’a même pas toujours été à Notre-Dame. Elle vient d’une des nombreuses chapelles et églises qui peuplaient l’île de la Cité, la chapelle Saint-Aignan. Associée au souvenir d’Héloïse et d’Abélard et à celui de saint Bernard qui y a prêché, cette petite chapelle a survécu aux tourmentes de la Révolution et des grands chantiers du XIXe siècle. Pendant la Terreur, elle accueillait des prêtres clandestins… Une première fois miraculée, notre Vierge est repérée en 1818 par les restaurateurs de Notre-Dame dont les révolutionnaires avaient abattu toutes les statues, et elle est placée sur le trumeau du portail de la Vierge. Elle est un exemple achevé du beau style gothique de l’Île-de-France. Plus tard, en 1855, Viollet-le-Duc décide de la rentrer dans la cathédrale pour la protéger et c’est ainsi qu’elle se retrouve devant le fameux second pilier à droite au début du chœur.

La Vierge à l'Enfant et au lys

C’est que cette Vierge à l’Enfant est exceptionnelle. Par la délicatesse, l’inventivité, la vivacité du travail de l'artiste. Marie et Jésus se regardent. Jésus, qui tient d’une main l’orbe (la boule qui représente le monde, insigne de sa royauté), joue de l’autre main avec un pan du manteau de sa mère et la pierre est ici si souple, si fouillée, qu’on croirait pouvoir la froisser. Marie a l’expression un peu sévère, un peu réservée, des saints de son siècle, mais sa posture est toute de souplesse. Elle brandit entre ses doigts son propre attribut, le lys, symbole de pureté et allusion à une autre royauté, celle de la dynastie dont Paris est la capitale, le « royaume des Lys ». Pas d’exaltation, mais un frémissement de vie. La Vierge respire, tout simplement. Tel est le génie du gothique classique, si je puis dire, du milieu du Moyen Âge. La Vierge au pilier est la Mère du Christ, toute baignée de majesté, mais elle est en même temps l’une d’entre nous, son corps vivant comme vit le nôtre, et le Sauveur du monde a le double menton des bébés heureux…

La Vierge du pilier : une statue devenue symbole

Rapidement, la Vierge du pilier, parmi des milliers de statues semblables, est devenue la plus connue. C’est devant elle que Paul Claudel, venu écouter l’orgue et n’osant pas se joindre aux fidèles dans la nef, a connu en 1886 la conversion radicale qui l’a fait chrétien.

Nombreux sont les écrivains qui l’ont évoquée, innombrables ses reproductions. C’est elle encore elle qui fait la première image de la première messe télévisée, en 1949. Elle devient « Notre-Dame de Paris », la personnification et de la cathédrale, et de la ville. Plus encore après l’incendie de 2019. Elle, la miraculée, nous attendra quand la cathédrale rouvrira ses portes, toujours jeune, toujours aimante, intacte.

P. Yves Combeau, o.p.

 

Découvrez la série Les piliers de Notre-Dame : portraits d'artisans qui oeuvrent à la reconstruction de la cathédrale. Une aventure humaine, professionnelle et spirituelle.

 

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