Le message de Marie par le frère Thierry Hubert, producteur du Jour du Seigneur
Le message délivré par la Vierge Marie à Lourdes nous inspirent encore aujourd’hui. Thierry Hubert se livre sur les apparitions mariales dans ce lieu devenu sanctuaire.
J’aime Lourdes. Pourtant, cela n’était pas gagné… Pour être au rendez-vous de Lourdes, il vaut mieux ne pas se rater soi-même. Et se donner — ou peut-être finalement recevoir — la grâce d’être présent. Réellement présent. « Voulez-vous me faire la grâce de venir ici ? » nous murmure encore aujourd’hui la Dame au creux du rocher.
J’aime Lourdes parce que le miracle y est permanent. Je veux dire celui de la conversion, du passage. On aurait tort de penser que seuls les malades viennent ici nécessairement avec l’espérance de recouvrer la santé. Le miracle permanent de Lourdes, c’est celui de la paix qui se dépose dans le cœur angoissé. Le rocher éventré laisse apparaître la grotte. De la cavité se niche la belle Dame, et à ses pieds, coule, enfouie, l’eau de la source. De nos cœurs endurcis par une vie qui ne fait pas toujours de cadeaux, par un destin trop abrupt, la Vie peut aussi ressurgir. M’approcher de la grotte, c’est conduire mon corps au lieu où la foi me fait espérer : une vie plus vivante, qui découle du Ciel, une vie qui rend visible le Royaume des Cieux, une vie qui dès à présent se goûte.
« Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde, mais dans l’autre » a dit, un jour, la Dame à la jeune bergère. Que n’a-t-on pas dit de cet « autre monde » qui ne serait que la récompense d’une vie de misère, au jour de son trépas ? Longtemps, cette parole m’a insupporté. J’en ai compris le sens en regardant les hospitaliers, tout heureux, servir leurs frères et sœurs malades. L’autre monde est à portée de son cœur et de ses mains lorsqu’il s’ouvre à l’inattendu de l’Esprit, lorsqu’elles s’ouvrent servantes. L’autre monde, la Vie éternelle, est à celui ou celle qui aime, ou qui déjà désire aimer, quand vivre d’amour paraît encore trop loin ou trop inaccessible.
La Vierge à Massabielle
J’aime Lourdes parce que cette Dame choisit comme lieu de villégiature un endroit perdu d’un village perdu, un petit bout de terre peu fréquentable, entre eaux boueuse et forêt d’arbustes sur le flanc d’un roc. « ‘La vierge à Massabielle ? On y mène les pourceaux !’ Ainsi comméraient les commères », rapportent les annales. La sagesse de Dieu est folie pour les hommes … et sa Mère, à n’en pas douter, en a fait bon usage. Loin des villes et des salons, loin des lieux bien-pensants et des usages mondains, la Dame crèche, ici. Assurément, cela lui convient bien car elle aimait sourire.
Mais il y a mieux encore. La belle Dame parle le patois local de la jeune Bernadette : « Que soy era Immaculada Counceptiou » lui confiera-t-elle, le jour du 25 mars, en la fête de l’Annonciation. Que Marie, que l’on proclame la Reine du Ciel, se hisse à la langue des petites gens, de ceux qui n’ont pas de savoir dans le domaine du beau-parler, c’est très fort. Elle ne s’abaisse pas, ni par condescendance, ni par humilité. Elle se hisse juste à la bonne hauteur, la nôtre, et nous dit qu’au Ciel, on parle la langue de chacun. Moi qui je suis pas un as des langues étrangères, ça me réjouit ! L’art d’être polyglotte, si utile pourtant dans le sanctuaire, trouve une heureuse résolution dans le cœur qui s’ouvre à la prière. Mon vocabulaire et mes fautes de grammaire ne sont pas un obstacle. Elle, la belle Dame, en fait son affaire. Elle nous délivre même son nom dans cette langue-là pour nous donner un reflet de notre propre identité. Elle, sans tache, nous redit ce que nous savions mais que nous avions peut-être oublié. Elle nous redit que toutes nos imperfections — appelons-les notre péché —, nous abîment et blessent notre humanité, mais que nous ne sommes pas réductibles à nos actes ratés. Elle, l’Immaculée Conception, nous dit le rêve de Dieu déjà réalisé pour chacun de nous. La Dame est belle et nous sommes beaux, de cette beauté des enfants de Dieu.
Au jour de la seconde visite à Massabielle, « soudain Bernadette dit : ‘Voilà une lumière ! La voilà !, » rapporte une de ses biographes, Marcelle Auclair. Voilà : nous sommes, pourrions-nous dire, essentiellement lumineux. C’est ce que nous célébrons, sans trop nous en douter, le soir, dans les rues de la ville haute ou en bas dans le sanctuaire, avec nos cierges allumés, en procession comme un cortège où chaque visage éclairé est signe de cette beauté. Nous ne formons ensemble qu’un seul corps lumineux qui se meut derrière Marie, la première sur ce chemin, pour nous conduire au pied de la basilique et au pied de son Fils. Dans les Évangiles comme ici au sanctuaire, Marie est d’ailleurs beaucoup plus discrète qu’on ne le pense. Lourdes, sanctuaire marial ? Certes, mais c’est Jésus qui est montré. Sa parole est offerte et son corps partagé « pour la vie du monde ». Son corps eucharistique, chaque après-midi, ouvre la procession et s'expose. Les deux corps, corps ressuscité présent sous l’apparence modeste du pain, corps du peuple rassemblé, n’en forment réellement qu’un.
Les apparitions mariales à Lourdes par le frère Manuel Rivero, o.p.